Le ciment Portland, terme générique englobant les ciments hydrauliques courants, se caractérise par la présence d’au moins 50% de clinker Portland. Sa propriété fondamentale est son caractère hydraulique, c’est-à-dire sa capacité à durcir au contact de l’eau et à conserver sa résistance et sa stabilité, même en milieu aquatique.
Breveté en 1824 par Joseph Aspdin, un maçon britannique, le ciment Portland tire son nom de la ressemblance du ciment durci avec la pierre de Portland, un calcaire reconnu pour sa robustesse et sa longévité. Isaac Johnson a perfectionné la formule dans les années 1840 en augmentant la température de cuisson, créant ainsi le premier “ciment Portland moderne”.
L’industrie du ciment a connu des avancées majeures au cours du 19ème siècle avec l’introduction des fours rotatifs et des broyeurs à boulets, permettant une production à plus grande échelle et une meilleure finesse du produit. Le 20ème siècle a vu la standardisation de la composition et des méthodes de test, suivie par l’introduction d’adjuvants chimiques dans les années 1950 et le développement de ciments à haute performance dans les années 1970, élargissant ainsi les applications du ciment Portland.
Le clinker Portland, qui entre dans la composition de tous les ciments courants, est obtenu à partir de plusieurs matières premières, principalement:
Ces matériaux sont extraits de carrières, souvent proches des usines de fabrication pour réduire les coûts de transport.
Le processus de fabrication du ciment Portland comprend plusieurs étapes. Tout d'abord, les matières premières sont broyées et mélangés pour obtenir une poudre homogène appelée farine crue. Cette farine crue est ensuite préchauffée dans un préchauffeur à cyclones, ce qui permet d'augmenter progressivement sa température avant son entrée dans le four. La farine préchauffée est introduite dans un four rotatif où elle est chauffée à environ 1450 °C. À cette température, les composants chimiques réagissent pour former des nodules appelés clinker.
Le clinker sortant du four est rapidement refroidi à l'aide de refroidisseurs à grilles, ce qui stabilise les minéraux formés et évite la décomposition. Le clinker refroidi est broyé finement avec du gypse (qui régule le temps de prise du ciment) et d'autres additifs éventuels dans un broyeur à boulets pour produire le ciment Portland.
La composition chimique typique du ciment Portland inclut :
Cette composition précise confère au ciment Portland ses propriétés hydrauliques caractéristiques, essentielles pour son utilisation dans la construction moderne.
Le ciment Portland est disponible sous plusieurs formes pour répondre à divers besoins de construction. Les deux principales catégories sont le ciment Portland ordinaire (CEM I) et les 19 ciments Portland composés (CEM II).
Le ciment Portland ordinaire, aussi connu sous le nom de CEM I conformément à la norme EN 197-1, est principalement composé de clinker (95-100 %) et d’additifs mineurs (0-5 %). Il est couramment utilisé dans la construction générale pour sa résistance standard et sa durabilité.
Les ciments Portland ordinaires (CEM I) sont classés en trois niveaux de résistance à la compression : 32,5, 42,5 et 52,5 MPa, mesurée après 28 jours. Chaque classe se subdivise en sous-catégories N (normale) et R (rapide) pour indiquer la vitesse de développement de la résistance.
Le CEM I présente un module d’élasticité élevé, assurant une excellente stabilité dimensionnelle des structures en béton.
Bien que le ciment Portland ordinaire offre une résistance modérée aux attaques chimiques, notamment aux sulfates et aux ions chlorure, pour des environnements très agressifs, il est recommandé d’utiliser des ciments spéciaux.
Le CEM I est sujet à la carbonatation, un processus réduisant le pH de la matrice cimentaire et affectant la durabilité du béton. Il est essentiel de prendre des mesures pour minimiser cet effet afin de prolonger la vie des structures.
Le temps de prise initial du CEM I varie entre 1 et 2 heures, avec un temps de prise final entre 3 et 5 heures. Les ciments de classe R offrent un durcissement accéléré, optimisant ainsi les délais sur les chantiers.
Le processus d’hydratation du CEM I libère de la chaleur, ce qui peut être bénéfique ou problématique selon les conditions environnementales et l’épaisseur des sections de béton coulées.
Le ciment Portland ordinaire CEM I est idéal pour les structures en béton armé ou précontraint. Il est particulièrement adapté à la fabrication de Bétons à Hautes Performances (BHP), grâce à sa capacité à supporter des charges élevées avec une déformation minimale.
Les ciments de classe R permettent un durcissement plus rapide, ce qui est crucial pour les projets nécessitant un décoffrage accéléré, notamment dans le domaine de la préfabrication.
Le ciment Portland ordinaire n’est pas recommandé pour la maçonnerie générale et les enduits.
Pour les structures massives, il est essentiel de gérer la chaleur d’hydratation pour éviter les fissurations thermiques. Cela peut nécessiter l’utilisation de techniques de refroidissement ou l’intégration de matériaux à faible chaleur d’hydratation.
Le ciment Portland composé, désigné par CEM II selon la norme EN 197-1, se caractérise par l’incorporation de divers constituants complémentaires au clinker. Ces additions visent à améliorer certaines propriétés du ciment ou à adapter ses performances à des applications spécifiques. Les ciments CEM II sont subdivisés en plusieurs catégories selon la nature et la proportion de ces constituants supplémentaires.
CEM II/A et CEM II/B-S : Incorporent du laitier de haut fourneau, un sous-produit de la fabrication de l’acier. La proportion de laitier dans ces ciments varie entre 6-20 % pour les CEM II/A-S et 21-35 % pour les CEM II/B-S. Cette addition confère au ciment une meilleure résistance aux attaques chimiques et une durabilité accrue.
CEM II/A et CEM II/B-P : Utilisent de la pouzzolane naturelle ou artificielle dans une proportion de 6-20 % pour les CEM II/A-P et 21-35 % pour les CEM II/B-P. La pouzzolane, d’origine volcanique, améliore la résistance à long terme et la durabilité du ciment en milieu agressif.
CEM II/A et CEM II/B-L : Intègrent du calcaire finement broyé, à hauteur de 6-20 % pour les CEM II/A-L et 21-35 % pour les CEM II/B-L. L’addition de calcaire favorise une meilleure ouvrabilité et réduit l’empreinte carbone du ciment.
CEM II/A-D : Contient de la fumée de silice dans une proportion de 6-10 %. La fumée de silice est un sous-produit de la production du silicium et des alliages de ferrosilicium, et son ajout augmente significativement la résistance et la durabilité du béton.
CEM II/A et CEM II/B-V : Incluent des cendres volantes siliceuses provenant de la combustion du charbon, entre 6-20 % pour les CEM II/A-V et 21-35 % pour les CEM II/B-V. Les cendres volantes améliorent la maniabilité du béton frais et sa résistance chimique à long terme.
CEM II/A et CEM II/B-T : Incorporent des schistes calcinés, dans des proportions allant de 6-20 % pour les CEM II/A-T et de 21-35 % pour les CEM II/B-T. Les schistes calcinés contribuent à l’amélioration des propriétés mécaniques du ciment.
Les ciments CEM II sont disponibles en différentes classes de résistance similaires à celles du CEM I, comme 32,5, 42,5, et 52,5 MPa, mesurées après 28 jours de durcissement. Les ciments de classe R (résistance rapide) permettent un durcissement accéléré, réduisant ainsi le temps de décoffrage et permettant une progression rapide des travaux.
Les ciments CEM II montrent une résistance améliorée aux attaques chimiques comme sulfates et autres agents agressifs, particulièrement lorsqu’ils intègrent des ajouts comme le laitier de haut fourneau et la pouzzolane. Cela les rend appropriés pour des environnements agressifs.
La résistance aux ions chlorure et à l’eau de mer est augmentée, ce qui prolonge la durabilité des structures exposées à de telles conditions.
La chaleur produite lors de l’hydratation est généralement plus faible pour les ciments CEM II, notamment ceux incorporant du laitier ou des cendres volantes. Cela réduit le risque de fissuration thermique, ce qui est crucial pour les constructions massives.
Les ciments CEM II ont des temps de prise similaires à ceux du CEM I, avec des variations selon les types spécifiques. Les temps de prise initiale varient typiquement de 1 à 2 heures, et les temps de prise finale de 3 à 5 heures.
Les ciments de classe R durcissent plus rapidement, ce qui est bénéfique pour les projets nécessitant une mise en service rapide.
Les ciments Portland composés CEM II sont les ciments les plus utilisés pour la construction d’ouvrages courants en béton armé (bâtiments résidentiels, commerciaux, et industriels). Leurs propriétés spécifiques, comme celles des ciments de classe R, les rendent particulièrement adaptés aux travaux nécessitant une élévation modérée de la température ou des résistances initiales élevées.
Grâce à leur meilleure résistance chimique, les ciments CEM II sont souvent utilisés pour les constructions en milieu marin.
La gestion de la chaleur d’hydratation rend ces ciments appropriés pour les ouvrages de grande taille comme les barrages et les ponts.
Le ciment Portland composé CEM II est largement employé dans la fabrication de mortiers. Il est particulièrement recommandé pour les mortiers de maçonnerie et de jointement, offrant une excellente adhérence et durabilité.
Ce ciment est également idéal pour la stabilisation des sables, qu’il s’agisse de petits projets réalisés avec une bétonnière ou de grands projets nécessitant une centrale à béton. Sa capacité à améliorer la cohésion et la stabilité des sables en fait un choix privilégié pour les travaux de sous-couche et de nivellement.
Le CEM II est un choix optimal pour les bétons riches et les fondations nécessitant une résistance jusqu’à C25/30 MPa.
Le ciment Portland composé CEM II est également utilisé dans la fabrication de béton maigre, qui est souvent employé comme couche de fondation ou pour la stabilisation des sols.
En mélange avec de la chaux, le CEM II est utilisé dans la réalisation d’enduits et sous-enduits. Ces applications nécessitent un liant capable de conférer une bonne adhérence, une résistance aux intempéries et une finition esthétique.